CONSTITUTION du ROYAUME LOMBARDO VENITIEN

(Du 24 avril 1815)

 

 

Comme c’est notre intention de former des colléges de députés tirés des diverses classes de la nation pour connaître, par des moyens constitutionnells, les vœux et les besoins du pays, nous avons divisé le royaume en territoire milanais et territoire vénitien, et établi pour chacun une congrégation centrale, dont l’une doit siéger à Milan, et l’autre à Venise. En outre, il est établi pour chaque province, dans la ville principale, où se trouve une délégation royale, une congrégation provinciale; en conséquence nous avons ordonné ce qui suit:

 

PREMIERE PARTIE

DES CONGREGATIONS CENTRALES

 

Art. 1er – Elles se composent (a) de nobles, (b) de propriétaires non nobles, (c) de représentans des villes royales.

Elles ont pour président le gouverneur du territoire, ou son lieutenant.

Art. 2 – Chaque province du territoire enverra à la congrégation un propriétaire noble et un autre non noble.

Art. 3 et 4 – Pour pouvoir faire partie de la congrégation, les propriétaires doivent (a) avoir les droits de citoyen dans le royaume lombardo-vénitien (les nobles en outre doivent avoir les titres établissant leur noblesse), (b) des biens-fonds de valeur de 4,000 scudi, et un domicile stable dans le royaume ou au moins en Autriche, (c) être âges de trente ans accomplis.

Art. 5 – Sont exclus (a) tous fonctionnaires publics et ecclésiastiques, (b) les individus déclarés incapables d’administrer leurs propres biens pour cause de prodigalité, (c), tous ceux qui ne professent pas une des religions chrétiennes tolérées dans le royaume lombardo-vénitien, (d) tout individu qui, poursuivi en matière criminelle, n’a pas été acquitté entièrement.

Art. 6 – Pour pouvoir faire partie de la congrégation, les représentans des villes royales doivent avoir (a) les droits de citoyen dans le royaume lombardo-vénitien, (b) 4,000 scudi en biens-fonds, fabriques ou fonds de commerce, et le domicile dans la ville, par laquelle ils sont nommés, (c) et être âges de trente ans accomplis.

Art. 7 – Sont exclus les banqueroutiers et les fonctionnaires des communes, pendant la durée de leurs fonctions.

Art. 8 – Nous nommerons les membres des congrégations centrales, en choisissant une personne sur trois candidats qui seront présentés par les corporations constituées.

Art. 9 – Les corporations procèderont comme il suit : les conseils de communes choisiront, d’après les règles de la loi du 8 juin 1805, un propriétaire noble e un propriétaire non noble de leur arrondissement, et les villes royales choisiront dans leur sein trois bourgeois et enverront les procès-verbaux à l’assemblée provinciale.

Art. 10 – Il doit être expressément énoncé, dans les procès-verbaux, qu’il n’y a pour les individus élus aucun des empêchemens ci-dessus énoncés.

Art. 11 – L’assemblée provinciale portera les noms des individus présentés sur des tableaux, en y joignant des observations, et les enverra au gouverneur de la province qui nous en donnera avis.

Art. 12 – A l’avenir, quand les membres des congrégations centrales devront être remplacés, les communes adresseront leurs procès-verbaux d’élection aux congrégations provinciales; celles-ci présenteront trois candidats aux congrégations centrales, et ces dernières nous soumettront leur choix pour la nomination définitive. Les villes royales enverront leurs procès-verbaux directement aux congrégations centrales.

Art. 13 – La durée des membres des congrégations est de six ans. Ils peuvent être réélus.

Art. 14 – Afin que tous les membres des congrégations ne soient pas renvoyés en même temps, après trois années, la moitié des membres nobles et des membres non nobles sortira.

Art. 15 – Tous ceux qui cessent d’avoir les qualités requises, ou qui sont dans un des cas d’empêchement prévus par l’article 5, cessent aussitôt de faire partie des congrégations, savoir en général sur l’invitation du président, et particulièrement, quant à ceux qui sont frappés des empêchemens prévus aux § b et d, par un décret de la congrégation.

Art. 16 – Aucun membre de congrégation ne peut en sortir sans avoir sollicité et obtenu de nous la permission.

Art. 17 – Nous nous réservons d’exclure tout membre qui se montrerait indigne de la confiance à lui accordée.

Art. 18 – Pour le renouvellement prochain des députés, conseils de communes procèderont aux nouvelles élections sur l’ordre du gouvernement; mais sans qu’il soit nécessaire qu’ils sortent de leurs attributions ordinaires, à moins qu’il n’en soit autrement ordonné.

Art. 19 – Les membres des congrégations centrales portent le titre de députés à la congrégation centrale. Ils reçoivent un traitement annuel de 2,000 florins aux dépens du territoire.

Art. 20 et 21 – Les membres des congrégations prêteront le serment après leur convocation; ils auront, pendant la durée de leurs fonctions, le rang et les préséances de conseillers d’état impériaux‑royaux; ils porteront le même uniforme qu’eux, excepté qu'ils auront le parement couleur orange au lieu de couleur pourpre.

Art. 22 – Les congrégations centrales s’occuperont (a) de la répartition et de la levée des impôts extraordinaires présentes par nous (cet objet sera expliqué par des instructions ultérieures); (b) de la répartition des impôts qui n’est pas encore faite dans chaque district; (c) de la recherche des dépenses et des charges des communes, et ensuite du règlement qui fixe les impôts que doivent supporter les communes; les villes et tout le territoire; (d) de la répartition des charges militaires sur tout le territoire, en temps de guerre comme en temps de paix; (e) de l’inspection des ponts, digues, et grandes routes, qui ne sont pas immédiatement aux frais de l’état; (f) de ce qui concerne les établissemens de bienfaisance et leurs revenus.

Art. 23 – Dans tous les cas, ces congrégations centrales n’ont toutefois inspection et voix consultative qu’à l’égard de l’établissement et de l’administration des dépenses non encore réglées; tout ce qui concerne des décisions et des dépensens déjà réglées par des lois précédentes, est confié aux congrégations provinciales aux conditions établies dans la seconde partie.

Art. 24 – Nous donnons aux congrégations centrales le droit de nous faire connaître les besoins, les vœux et les désirs de la nation, et nous nous réservons de prendre leurs conseils quand nous le jugerons convenable.

Art. 25 – Les congrégations centrales peuvent rendre des ordonnances, établir des impositions et charges, et exercer en nom propre le pouvoir législatif, judiciaire et exécutif, sur toutes les affaires qui leur sont confiées, aussi bien que dans l’interprétation des lois; le résultat de ses délibérations doit être soumis au gouvernement local; et celui-ci doit le confirmer, ou lorsqu’il n’y est pas légalement autorisé, le soumettre à notre haute approbation. Les congrégations centrales peuvent, lorsque le gouvernement juge qu’il est sans attribution, s’adresser directement à nous.

Art. 26 – Les délibérations seront publiées en notre nom et seulement lorsqu’elles auront reçu notre nom et seulement lorsqu’elles auront reçu notre approbation.

Art. 27 – Les frais de secrétariat et autres des congrégations centrales seront payés aux dépens de toutes les provinces du territoire.

Art. 28 – Le président distribue les travaux entre les membres de la congrégation centrale.

Art. 29 – Les affaires ordinaires seront traitées et décidées dans des séances fixées par le président; les affaires plus importantes sont confiées à une commission pour faire un rapport.

Art. 30 – Le président recueille les voix, et les décisions sont prises à la majorité absolue. En cas d’égalité de voix, celle du président décide; toutes les opinions pour et contre sont consignées au procès-verbal.

 

RANG DES MEMBRES EN SEANCE

 

Art. 31 – Les membres siégent comme il suit: les nobles, les propriétaires non nobles, les députés de Milan ou de Venise, les députés des autres villes; aujourd’hui d’après l’âge, et plus tard d’après l’ancienneté d’élection. Toutes les voix ont une force égale.

Art. 32 – Les propositions que le président ou les membres veulent faire, doivent être portées sur le procès-verbal avant d’être mises en délibération.

Art. 33 – La congrégation centrale soumettra à notre approbation un réglement sur la forme des procès-verbaux et l’ordre des délibérations.

Art. 34 – Les rapports entre la congrégation centrale et nos siéges royaux auront lieu au moyen de notes, et les rapports, avec la cour par voie de supplique.

Art. 35 – Les congrégations provinciales peuvent être surveillées par la congrégation centrale, et elles doivent lui être soumises dans toutes les affaires d’administration qui ne sont pas du ressort du gouvernement. Elles font des rapports à la congrégation centrale et en reçoivent des décrets.

Art. 36 – Les congrégations centrales doivent, dans le délai de quatorze jours, après leur session, envoyer au gouvernement les registres de leurs délibérations, que celui‑ci transmet à la cour avec ses observations.

 

SECONDE PARTIE

DES CONGREGATIONS PROVINCIALES

 

Art. 37 – Une congrégation provinciale est établie dans chaque ville capitale d’une province. Elle est présidée par le délégué royal (delegato regio), ou son représentant.

Art. 38 et 39 – Les congrégations provinciales son composées, selon la grandeur de la province, de huit, six, quatre propriétaires, moitié nobles et moitié non nobles; en outre, d’un député pour chaque ville royale située dans la province. La distribution des provinces en trois classes, d’après leur grandeur sera publiée ultérieurement.

Art. 40 et 41 – Les propriétaires, pour être admis dans les congrégations provinciales, doivent jouir des droits de citoyen dans le royaume lombardo-vénitien (ou avoir des lettres de noblesse), posséder 2,000 scudi de biens, être domiciliés dans la province et être âgés de trente ans accomplis.

Art. 42 – Ils sont exclus pour les causes d’empêchement fixées dans l’article 5.

Art. 43 et 44 – Les députés des villes doivent avoir leur domicile et jouir des droits de citoyen dans leur ville, posséder 2,000 scudi en biens, fabriques ou fonds de commerce; être âges de trente ans accomplis. Les empêchemens établis article 7 les excluent de la congrégation.

Art. 45 – Nous nommons, pour la première fois, les membres des congrégations provinciales, de la manière indiquée aux articles 9, 10 et 11.

Art. 46 – Pour les remplacemens ultérieurs, les communes présenteront leurs choix aux congrégations provinciales; celles-ci présentent trois noms à la congrégation centrale. Si la congrégation centrale n’a aucune observation à faire, le premier inscrit est nommé et conformé par le gouvernement. Si le gouvernement a des observation à faire, il présente un rapport à la cour.

Art. 47 – En ce qui touche la durée des fonctions, le renouvellement, l’exclusion des membres des congrégations provinciales, sont applicables les articles 13, 14, 15, 16; l’exclusion peut être consentie directement par le gouvernement.

Art. 48 – Les délégués royaux (delegati) dirigent les élections suivant suivant les principes ci‑dessus établis.

Art. 49 – Les membres des congrégations provinciales s’appellent députés à la congrégation provinciale. Ils prêtent le serment entre les mains du délégué; ils ne reçoivent aucun traitement; ils ont pendant la durée de leurs fonctions le rang de conseiller impérial et royal; ils suivent immédiatement dans les solennités le vice-délégué, et portent le même uniforme que lui, mais avec les revers de couleur orange.

Art. 50 – Les congrégations provinciales ont dans leurs attributions, suivant les bases posées dans l’article 23, (a) les affaires relatives aux impôts de la province, (b) l’administration économique des villes et communes, (à cet effet, les conseillers des communes doivent présenter leur budjet annuel à la congrégation provinciale), (c) les canaux et les grandes routes, en tant qu’ils regardent les provinces et non l’état; (d) les établissemens de bienfaisance.

Art. 51 – Sur ces différens points, et autres affaires de l’administration, les congrégations provinciales peuvent adresser des observations motivées à la congrégation centrale, et celle ci peut en faire usage, ou les renvoyer comme non fondées.

Art. 52 – Les résolutions des congrégations provinciales qui doivent être publiées à la chancellerie ou aux municipalités, seront signées par le délégué (qui a attribution spéciale), par un député et par le référendaire.

Art. 53, 54 et 55 – Les congrégations provinciales ont un référendaire (ayant seulement voix consultative), un caissier, un contrôleur et un réviseur. Ces quatre fonctionnaires recevront un traitement aux frais de toute la province. Le délégué et le référendaire se  distribueront les travaux. Les congrégations provinciales et les délégations auront des procès‑verbaux, des registres et des expéditions communs; les affaires seront en conséquence poursuivies en commun. Le délégué recueillera les voix, en qualité de président, ainsi qu il a été dit article 30 à 32.

Art. 56 – Les congrégations provinciales doivent envoyer au gouvernement local leurs procès‑verbaux, tous les quatorze jours, par l’intermédiaire de la congrégation centrale qui l’adresse au gouvernement de la même manière, avec ou sans observations.

 

Donné à Vienne, le 24 avril 1815 de notre‑règne le 24e.

 

 

 

 

 

FONTE:

Dufau, Duverger, Guadet, (vol. IV), 1830.



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